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  • 18th Nov 2022

Combattre la résistance aux antibiotiques

2 approches comportementales pour réduire la consommation d’antibiotiques en France

Aujourd’hui marque le début de la Semaine mondiale pour un bon usage des antimicrobiens 2022, une initiative conjointe de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, du Programme des Nations Unies pour l’environnement, de l’Organisation mondiale de la santé et de l’Organisation mondiale de la santé animale.

En Europe, 33 000 personnes meurent chaque année d’infections résistantes aux antibiotiques. La résistance croissante des bactéries aux antibiotiques – ou antibiorésistance – est une menace mondiale qui a des conséquences sur la santé humaine, la santé animale et l’environnement. Tous s’accordent pour le dire: le mauvais usage et la surconsommation d’antibiotiques contribue largement à l’accélération de ce phénomène. 

Comment donc réduire notre surconsommation d’antibiotiques? Deux approches nous paraissent importantes au BIT: travailler d’un côté avec les médecins pour les aider à mieux (moins) prescrire, et de l’autre aider le grand public à mieux (moins) consommer ces médicaments.

1. Compter pour se rendre compte : aider les médecins à mieux prescrire

En France, environ un tiers des prescriptions actuelles d’antibiotiques sont jugées évitables. En décembre 2021, nous avons travaillé avec la Direction interministérielle de la transformation publique (DITP), l’Assurance Maladie et AntibioEst. Ensemble, nous avons repensé le feedback envoyé par l’Assurance Maladie aux médecins généralistes pour leur permettre de prendre conscience des prescriptions d’antibiotiques évitables. Nos précédents travaux aux BIT ont en effet montré que fournir des retours aux médecins sur leurs pratiques peut augmenter la motivation au changement, vers de meilleures pratiques. 

Fruit d’un travail itératif auprès de médecins généralistes, le nouveau système de feedback propose notamment:

  • D’évaluer la qualité (c’est-à-dire la pertinence), plutôt que la quantité, des prescriptions d’antibiotiques des praticiens
  • De mettre en avant un score unique et global pour aider le clinicien à comprendre d’un coup d’œil si ses prescriptions sont alignées sur les recommandations de santé publique
  • De donner aux médecins généralistes la possibilité de se fixer des objectifs personnels pour la réduction des prescriptions inutiles
  • D’utiliser des exercices pour amener les médecins à estimer leurs taux de prescriptions avant de partager les taux réels avec eux. Étant donné que nos estimations sont souvent inexactes, cette technique peut créer une prise de conscience à l’origine d’un changement de comportement. Cette approche a été utilisée avec succès pour réduire les taux de prescriptions d’opioïdes aux États-Unis.

Maquettes proposées pour les retours aux médecins généralistes

Ce nouveau système ambitieux sera déployé auprès de professionnels de santé dans la  région Grand Est en 2023 et évalué dans le courant de l’année 2024. Nous sommes impatients de partager les résultats.

2. Responsabiliser les patients, d’abord en comblant les lacunes d’information 

Même si les antibiotiques ne peuvent s’obtenir en France que sur ordonnance, les patients ont également un rôle à jouer : il est crucial qu’ils ne les utilisent pas en dehors d’une prescription médicale, mais aussi qu’ils évitent de réclamer des antibiotiques auprès de leur médecin. En 2020, 33% des médecins généralistes ont fait état de pressions insistantes fréquentes de la part de leur patient pour obtenir une prescription d’antibiotiques. 

Nous avons cette fois travaillé avec Santé Publique France afin d’identifier des pistes pour une campagne de sensibilisation grand public. Les résultats obtenus à travers une étude en ligne avec un échantillon représentatif de 4000 adultes résidant en France ont mis en lumière des résultats importants: 

  • Tout le monde connait le slogan “les antibiotiques, c’est pas automatique”, clé d’une campagne menée en France en 2002, mais tout le monde ne sait pas forcément dans quels cas on doit (ou pas) les prendre. Un participant sur 5 (21%) pensait par exemple à tort que « les antibiotiques agissent sur les infections virales et pas sur les infections bactériennes ». 
  • Communiquer sur la menace de l’antibiorésistance ne semble pas être prometteur, du moins sur le court terme. Cette piste semble en effet avoir aggravé des méconnaissances existantes sur ce phénomène encore assez mal compris.
  • La brièveté du message s’est avérée être plus importante que la pédagogie extensive pour communiquer sur des messages de bon usage. Une communication directe sur les situations spécifiques où les antibiotiques ne sont pas utiles a augmenté les connaissances des participants et leur intention d’agir sur leur propre consommation d’antibiotiques.

Sur la base de cette étude, nous avons recommandé de communiquer sur les éléments ci-dessous, de manière séquencée: 

  1. Un message court axé sur la sensibilisation au bon usage des antibiotiques incluant des situations concrètes pour lesquelles les antibiotiques sont inutiles.
  2. Un message qui sensibilise le public aux conséquences et dommages causés par la surconsommation globale d’antibiotiques et insiste sur une responsabilité personnelle à agir
  3. Des messages de vulgarisation scientifique sur un format plus long expliquant les mécanismes de l’antibiorésistance

Le point 1 est la stratégie que semble avoir adoptée Santé Publique France sur cette nouvelle campagne. Nous nous en réjouissons, et avons hâte d’en voir les effets

Campagne de communication SpF sur le bon usage des antibiotiques.

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Êtes-vous intéressé à travailler avec BIT sur le défi de la résistance aux antimicrobiens?