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  • 27th Nov 2020

Du mal à résister à la tentation du Black Friday? Quel meilleur jour pour penser à réparer, plutôt que remplacer?

A l’approche du Black Friday, nos boîtes mail se remplissent de promotions pour des téléphones, ordinateurs, tablettes, et autres nouveautés électroniques. Pourtant, quand on sait qu’en 2019 on a produit près de 53,6 millions de tonnes de déchets électroniques dans le monde, et que plus de 80% de ces déchets ne sont pas traités correctement, on aimerait y repenser à deux fois avant “d’ajouter au panier”. 

Les gouvernements semblent aussi commencer à faire de la consommation durable une priorité : le gouvernement français a par exemple fait de la promotion d’un modèle circulaire où les individus réparent plutôt que remplacent un de ses programmes environnementaux phares, suivi de près par la déclaration de politique publique du gouvernement britannique, et le plan d’action pour une économie circulaire de la Commission Européenne. 

Mais qu’est-ce qui nous empêche de réparer, plutôt que de remplacer ? Et comment promouvoir efficacement la réparabilité et affecter les comportements d’achat en conséquence ?

C’est ce que nous avons cherché à comprendre dans le cadre d’un projet mené avec la Direction Interministérielle de la Transformation Publique (DITP) et Thibaud Griessinger pour le compte du Ministère de la Transition Écologique. 

La réparabilité est un concept complexe, souvent mal compris

Le Ministère de la Transition Écologique lancera en janvier 2021 un indice de réparabilité généralisé à tous les produits électriques et électroniques. Nous les avons accompagnés pour mieux comprendre comment afficher cet indice afin d’en améliorer la compréhension et de susciter l’engagement. 

Comme l’indice gouvernemental était encore en cours de développement au moment du lancement de notre projet, nous avons basé nos travaux sur l’indice de réparabilité pour les ordinateurs portables qui avait déjà été développé et validé par Fnac-Darty.

Notre exploration du parcours d’un consommateur considérant un nouvel achat d’ordinateur portable a révélé, entre autres, que le concept de réparabilité reste mal compris (qu’est-ce que cela veut dire qu’un produit est “réparable” ? comment comparer les scores ?), et que les consommateurs ont du mal à percevoir les avantages d’un achat réparable. Ils tendent en effet à penser que la réparation sera coûteuse et pénible, et ne perçoivent du coup pas les avantages économiques de pouvoir garder leur ordinateur plus longtemps. 

Nous avons proposé et testé de nouveaux affichages de l’indice de réparabilité s’appuyant sur deux leçons clés des sciences comportementales : 

  1. Le message principal doit être clair et immédiat : ici, il s’agissait donc de créer un affichage permettant de comparer directement deux produits, et de savoir tout de suite si un score est bon ou non. 
  2. Les bénéfices pour l’individu doivent être rendus saillants : nous avons ici inclus un message permettant de mettre en avant les bénéfices en termes de durabilité et d’économies réalisées. 

Image 1: L’index de réparabilité 

Image 2: L’index sur le site Darty 

Une des expérimentations en conditions réelles les plus larges de ce domaine

Notre collaboration avec Fnac Darty nous a permis de tester l’impact de différentes présentations de l’indice dans des conditions réelles: tout d’abord via un essai randomisé contrôlé sur le site web de Darty, auquel plus de 140 000 clients ont participé; puis via une étude qualitative dans les magasins Darty. Cette étude est l’un des essais randomisés les plus larges conduits à ce jour dans ce domaine, ce qui est d’autant plus remarquable que la plupart des études avaient jusqu’ici été réalisées en laboratoire. 

Nos résultats ont montré que l’indice n’a pas eu d’impact sur le score de réparabilité moyen des ordinateurs achetés. Autrement dit, même après avoir vu le score, les clients n’ont pas fait d’achats plus réparables. 

Cependant, et peut être étonnamment, les clients semblaient être moins susceptibles de compléter leur achat s’ ils avaient vu le score de réparabilité, et à la place préférer ne rien acheter, ou alors acheter un ordinateur qui n’avait pas encore été noté. Nous ne pouvons pas dire avec certitude si ces résultats veulent dire que les clients souhaitaient éviter les potentielles mauvaises nouvelles associées avec un score de réparabilité plus bas, ou si le score les avait fait repenser leur besoin d’acheter un nouvel ordinateur ; ces résultats suggèrent néanmoins que l’affichage de la réparabilité peut affecter les comportements d’achat, et ne devrait pas être abandonné. 

Généraliser la réparabilité 

La promotion d’un mode de consommation durable n’allait jamais être chose facile, surtout lorsqu’on sait à quel point les nouveautés électroniques peuvent être attrayantes.

Nos résultats offrent cependant quelques leçons qui, selon nous, peuvent être utiles pour soutenir la promotion de modèles de consommation plus circulaires: 

  1. Sans être accompagné, un indice seul ne va pas résoudre le problème: pour qu’une mesure telle qu’un indice de réparabilité puisse être un succès, les motivations des consommateurs, des distributeurs et des fabricants doivent être alignées. Sinon, il est probable que les fabricants et les distributeurs ne choisiront d’afficher que les bons scores, dépouillant ainsi l’indice de sa valeur comparative. 
  2. Pour qu’il soit pris en compte, l’indice doit être rendu central pour les consommateurs: les consommateurs ne vont pas naturellement chercher les informations sur la réparabilité, et il est même possible qu’ils évitent ces informations dans certains cas.  L’indice doit donc être mis en évidence, et inclus sur tous les produits. Cette leçon a été prise en compte par le gouvernement français, qui va rendre l’affichage du score obligatoire.
  3. Il reste du travail à faire pour familiariser les consommateurs avec le concept de réparabilité: la communication et l’information disponible sur l’indice, son objectif et la façon dont il est construit semblent fondamentaux pour que l’indice soit pris en compte. Le personnel en magasin, qui joue encore un rôle important dans les achats, devrait aussi recevoir une formation afin de pouvoir transmettre les bonnes informations aux clients. 

Nous avons été très heureux de voir que ces résultats ont été pris en compte par le gouvernement français, et espérons qu’ils seront utiles à d’autres. En attendant, cette année nous allons essayer de montrer l’exemple en résistant au chant des sirènes du Black Friday et de ses offres alléchantes sur les nouveaux produits électroniques… 

Le rapport complet sur ce projet est disponible ici

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